Comme tous les sports, le hockey pratiqué à haut niveau est très souvent synonyme de sacrifices. Ces sacrifices sont multiples. La plupart des joueurs professionnels ont évolué à un moment où à un autre loin de leur famille, souvent livrés à eux-mêmes dans ce processus où l’échec n’est pas envisageable. Dès lors, les jeunes se lancent dans un sport-étude. Un sport-étude correspond à un équilibre entre les études et le sport. Cependant, cet équilibre recherché est-il atteint dans le hockey français ? Quelles sont les issues d’un sport-étude pour les jeunes hockeyeurs qui veulent devenir professionnels ? Les jeunes sont-ils véritablement encadrés et aidés dans leur projet ?
Le hockey professionnel français se développe peu à peu avec l’envie de vouloir incorporer de plus en plus de jeunes dans les effectifs professionnels. De ce fait, une nouvelle porte s’ouvre aux jeunes hockeyeurs désirant faire du hockey sur glace, leur métier. Afin d’incorporer un effectif professionnel, le jeune joueur doit suffisamment se développer en temps que joueur. Il doit donc ainsi évoluer à un niveau suffisamment proche de celui de l’équipe qu’il vise. Cependant, la marche entre les équipes professionnelles de la Ligue Magnus et même de la Division 1 et la catégorie des U20 est en réalité bien plus qu’une marche mais un « fossé ». Cette différence de niveau est majoritairement due au manque de passerelles fiables entre la catégorie U20 et les effectifs professionnels. En effet, il n’existe en réalité qu’un seul moyen de se rendre tout en haut de l’échelle du hockey français pour les jeunes.
Ce seul et unique moyen est plus connu sous le nom de « licence bleue » qui permet au
jeune possédant cette licence de pouvoir évoluer dans différents championnats de niveaux différents tout en appartenant en réalité à un seul club. Bien que cette idée apparaît comme une solution claire et nette pour le jeune, elle soulève néanmoins une immense interrogation : qu’en est-il des études du jeune ?
Comme énoncé précédemment, le jeune possédant une « licence bleue » sera possiblement prêté au sein de plusieurs clubs. De ce fait, le jeune se doit de se dégager
du temps afin de pouvoir s’entraîner et de jouer avec une équipe d’un calibre supérieur tandis que la plupart des entraînements des effectifs professionnels s’effectuent en
journée. Ce type de créneau est, bien évidemment, basé sur le simple fait que ce sont des effectifs professionnels, ce qui signifie que les joueurs de l’effectif sont rémunérés pour leurs qualités de joueurs de hockey, ce qui en fait leur métier. De ce fait, un jeune joueur prêté
dans divers clubs se doit de trouver un moyen de lier les études et le hockey à haut niveau. Le lien entre ces deux points essentiels de la vie du jeune hockeyeur est souvent
synonyme de sacrifice dans l’un des deux domaines, à tel point que, souvent, un choix est malheureusement inévitable pour la plupart des jeunes. Ceci est le cas de Paul Schmitt, étudiant de 20 ans en deuxième année de kinésithérapie.
Paul Schmitt est un jeune ayant été formé aux Jokers de Cergy depuis ses premiers pas sur la glace. Depuis, Paul Schmitt a eu la chance d’intégrer l’effectif des Jokers de Cergy en Ligue Magnus dès l’âge de 17 ans, ce qui durera trois ans. D’un autre côté, Paul Schmitt a également été un international tricolore en portant fièrement les couleurs de la France dans les équipes de France U16 ; U18 et U20. Malgré tout, Paul a été contraint de prendre sa retraite à seulement 20 ans. Lorsque nous lui avons demandé ce qui l’a poussé à prendre cette décision drastique, voici les propos qu’il nous a tenu : « J’ai dû prendre cette décision très difficile pour moi car j’étais face à un choix entre le hockey et mes études de kinésithérapie. Il n’était plus possible de combiner le hockey en professionnel et les études.
La décision a été très dure à encaisser mais j’ai pris du temps pour y réfléchir. »
Malgré tout, il est possible de lier le hockey et les études d’après Paul Schmitt. Selon ce
dernier, lier le hockey et les études nécessite de faire des sacrifices : « J’ai eu des
aménagements lors de mes études supérieures (ILEPS, IFMK DANHIER). Je pouvais passer
les examens en décalé ou encore rattraper des cours. Ils m’ont parfaitement aidé !
Faire des études et jouer parallèlement en Ligue Magnus a demandé beaucoup de sacrifices mais j’aimais consacrer ma vie au deux ! Pour moi, c’était indispensable de faire les deux. Les études m’ont permis pendant la saison de penser à autre chose, de consacrer mon esprit à autre chose. Cela m’a permis d’avoir une autre vision des choses ! ».
Néanmoins, Paul Schmitt a donc décidé de prendre sa retraite en tant que joueur professionnel à l’aube de cette saison après avoir mûrement réfléchi. Malgré tout, Paul ne garde que de bons souvenirs de ses années en tant que joueur professionnel : « Je ne changerais rien. Les moments durs pendant mes années de hockey m’ont vraiment permis de devenir l’homme que je voulais être. Les gens ne se rendent pas compte de ce qu’est la vie de sportif de haut niveau et de tous les sacrifices à faire pour y arriver, mais tous les échecs m’ont permis de grandir dans tous les aspects de la vie. Pour moi, sans échouer on n’arrive à rien.
Même les périodes de blessure nous permettent mentalement de revenir plus fort. Dans mon cas, ma blessure en 2021 m’a rendu réellement plus fort mentalement. » De plus, il nous a également affirmé qu’il n’est toutefois pas fermé à un retour au jeu, tout en démontrant sa gratitude envers le club de Cergy : « Je pense qu’il ne faut pas se fermer de portes, on ne sait pas de quoi la vie est faite. Je pense que j’ai beaucoup apporté à Cergy mais je leur dois tout aussi. Le fait d’avoir été le premier jeune de la formation à jouer en pro et à faire un championnat du monde était une grande fierté. C’était une véritable histoire d’amour avec Cergy. J’étais très attaché aux supporters, à la ville, aux dirigeants, à mes coéquipiers d’enfance. C’était un sentiment spécial de jouer pour son club formateur. Il y avait vraiment un grand sentiment d’appartenance. Petit on va au match, on a envie
de faire comme les grands ! Cergy aura plus qu’une grande place dans mon cœur. Je ne sais pas encore ce que je ferai l’année prochaine. Mes études me demandent beaucoup de temps mais je ne ferme la porte à rien et je me laisse porter. »
À l’inverse de Paul Schmitt, il n’est pas anodin de voir des joueurs mettre en suspens leurs études, voire de les arrêter, afin de poursuivre leur objectif de devenir un joueur de hockey professionnel. Il est capital de mettre l’emphase sur ce type de profil. En effet, personne n’est à l’abri d’une blessure, d’un événement tragique, etc. En d’autres termes, qu’arrivera-t-il à un joueur qui n’a aucun diplômes s’il subit une grave blessure qui mettrait un terme à sa carrière ? Que fera ce jeune joueur à l’issue de ses années U20 s’il n’a aucunes portes de sorties dans le hockey ?
Dès lors, le joueur sera dans une impasse puisqu’il aura abandonné ses études, ce qui fait qu’il n’aura aucunes qualifications pour se lancer dans une quelconque carrière professionnelle. Ce type de questionnement n’est pas anodin dans le parcours d’un jeune joueur de hockey. En effet, il est compliqué pour un joueur évoluant en dernière année de la catégorie U20 de se décider comme l’a courageusement fait Paul Schmitt. En d’autres termes, il n’existe en réalité que quelques issues pour un joueur dans cette situation, ce dernier peut mettre un terme à sa jeune carrière de hockeyeur, et ainsi renoncer à un rêve d’enfant qui a mûri de jours en jours au profit de ses études.
D’un autre côté, il peut décider de se lancer à la poursuite de ce rêve sans aucunes réelles garanties de devenir un jour un joueur de hockey professionnel. Dans tous les cas, il est possible que le jeune ait des regrets à l’issue de ce choix crucial qui déterminera ce qu’il est pour le restant de sa vie.
Rédaction : Raphaël Dangueuger
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